article paru le 21 juin 2016 dans : L’ESSentiel de L’Économie Sociale et Solidaire, Nicole Morgan
Projet citoyen participatif
Tout comme son homologue canadien, la réflexion de Mipygreen porte sur une production alimentaire durable, en aidant à réintroduire l’agriculture urbaine dans nos villes. Cette initiative examine comment la conception des villes, des paysages urbains, des bâtiments et des jardins peut être pourvoyeuse de nourriture dans la ville à partir de sources locales. Le principe d’une production alimentaire urbaine est parfois rejeté pour des raisons esthétiques, l’aménagement des espaces de jardin incorporant des plantes comestibles est essentielle pour que ces lieux soient acceptés et perçus comme une initiative innovante, source de liens. Et pour répondre à ce défi, l’art s’invite régulièrement sous forme de dessins, photos… dans ces espaces synonymes de liens sociaux et très inspirants sur le plan artistique. L’exposition explore notamment une variété de questions liées à la conception de l’agriculture urbaine, à travers une série d’études de cas, de produits et de systèmes. L’initiative vise à diffuser des idées et des connaissances sur les meilleures pratiques dans l’agriculture urbaine.
« Les paysages comestibles, clefs de voûte de la production alimentaire de demain »
Mipygreen se définit comme un projet pluridisciplinaire axé sur les arts culinaires, l’alimentation et le jardinage en milieu urbain. Il y a plus d’un an l’association a constitué un groupe de travail pour un jardin partagé à côté de l’Espace Andromède, à Blagnac (31). Il s’agit d’un potager sur 150 m2 cultivé dans des bacs, puis son action s’est étendue à la réhabilitation de la résidence Les Fontanelles à Toulouse, composée de 7 bâtiments pour 180 logements construits au début des années 60.
Heike Trentzsch évoque la manière dont le projet a pris forme puis évolué “Suite à l’exposition de Carrot city le responsable commercial de DV constructions (filiale du groupe Bouygues) nous a contactés. Les divers projets d’agriculture urbaine présentés lors de cette exposition l’avaient fortement inspiré et notre rencontre a donné lieu à une collaboration avec Mipygreen. Il est vrai que les expositions itinérantes de Carrot City sont vectrices de belles idées car elles regroupent des œuvres de designers, d’artistes et d’étudiants, d’architectes, de concepteurs de design urbain, de paysagistes, de designers industriels, de sculpteurs, et de concepteurs de projets d’aménagement urbain. Chacun à sa manière tend à apporter des éléments de réponses, notamment sur la manière dont une ville moderne peut intégrer un projet de production alimentaire ou comment l’intégration de la production alimentaire dans la ville impacte nos bâtiments et nos espaces urbains, mais aussi comment nous pouvons concilier l’augmentation des populations urbaines et l’utilisation des terres pour la production alimentaire et enfin comment nous pouvons intégrer la production alimentaire dans les zones urbaines à forte densité dans des bâtiments et des espaces restreints.
Semer pour récolter…. tout un art de vivre
La réussite d’un projet puise toujours sa force dans la convergence des idées et des volontés, comme le démontre les projets menés par Mipygreen “Nous avons proposé au responsable commercial de DV constructions trois projets de jardins et potagers intégrés, pouvant s’appliquer à divers programmes, tant dans la rénovation que la construction de logements neufs, mais malheureusement les concours auxquels participait DV n’ont pas retenu les propositions faites et par conséquent celles de Mipygreen non plus. Mais c’est encore lui qui nous a impliqué dans le projet pilote de PLSA (PatrimoineLanguedocienne SA), pour la rénovation des Fontanelles à Toulouse (un programme de réhabilitation remarquable). Au début nous devions uniquement mobiliser quelques habitants pour participer à un potager, mais au vu de l’état de l’ensemble des espaces verts qui étaient à refaire suite aux travaux, nous avons proposé à PLSA de nous occuper de toute la réimplantation des espaces verts en concertation avec les habitants.”
Le projet, porté conjointement par l’architecte Loic Jan du cabinet A&B Architectes, le bailleur social, et le constructeur (Bouygues Bâtiments Centre Sud-Ouest), a constitué le lien entre les responsables de l’immobilier d’un côté et les habitants de l’autre. “Inclure une dimension transversale dans le projet a permis de croiser les regards et faciliter l’approche globale des enjeux et objectifs. Ceux-ci étaient à la fois paysagers et éducatifs tout en favorisant le vivre-ensemble. Par le biais de questionnements et de concertations avec les locataires de la résidence, le projet a donné naissance à des espaces verts composés d’arbres fruitiers, plantes grimpantes (kiwi), vignes, houblon, un mini-jardin aromatique, une prairie fleurie et un potager collectif. Les espaces verts de la Résidence les Fontanelles seront donc en partie comestibles dans un futur proche. Un élément particulier qui permet aux nombreux locataires de vivre pleinement leurs espaces verts.”
Inciter les habitants à un mode de vie durable, telle est la mission que s’est fixée Mipygreen. Elle pourrait très bien illustrer la célèbre phrase de Gandhi “Sois le changement que tu veux voir dans ce monde” puisqu’elle encourage les habitants à agir et à pérenniser les actions menées.
Parallèlement Heike Trentzsch s’est formée à la méthode SPIRAL, une démarche de concertation élaborée par le Conseil de l’Europe. Spiral vise à dégager les indicateurs de bien-être et à mobiliser tous les acteurs d’un territoire, dans la coresponsabilité et la co-construction d’un projet. Cette méthode a même été partiellement utilisée lors de la concertation avec les habitants des Fontanelles pour transformer leurs espaces verts. “le bien-être étant une
composante essentielle dans la vie des habitants, les espaces verts sont voués à devenir des espaces de refuge et de loisirs et sont de ce fait devenus une des composantes primordiales de l’urbanisme actuel. Un café associatif et participatif existe déjà dans la résidence. Il est prévu de fonder en plus des clubs de jardinage ou de bricolage, pour consolider le lien entre voisins. L’entretien des espaces verts pourrait être pris en charge par les résidents eux-mêmes. En prime une baisse de charges !”
Les compétences de Mipygreen s’étendent ainsi au paysagisme des espaces verts et à la création d’espaces verts en partie comestibles dans des résidences neuves ou en voie de rénovation.“Les Espaces verts occupent pas mal de place dans une résidence, si à proximité des plantes d’ornement, nous cultivions des légumes (certains font de très belles fleurs) ou des fruits, alors il serait possible aux personnes n’ayant pas forcément accès à cette alimentation d’en bénéficier, sans parler de l’implication des résidents à la gestion de ” leur espace vert “.
Mipygreen donne tout son sens au mot culture
Outre ses activités de terrain Mipygreen propose des animations, des ateliers et des conférences diverses sur la thématique du développement durable et de l’agriculture urbaine. Elle s’inscrit pleinement comme projet culturel.
Ce mot “culture” possède tant de signifiants qui semblent parfaitement lui correspondre. En effet, si l’on se réfère à son étymologie, “culture”vient du verbe latin “colere” qui signifie “cultiver son champ” ou plus généralement le lieu que l’on habite. Ce qui implique aussi de mettre ce lieu en valeur, de le soigner, de le travailler. Il s’agit d’une activité à la fois transformatrice et valorisante. En transformant son environnement l’homme se transforme lui-même et se perfectionne, tant à titre personnel qu’au sein de la collectivité.
Et c’est précisément l’objectif poursuivi par Mipygreen.
Credit :
Merci à Mipygreen et Carrot city